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Oniros ?
Oniros est un joueb que j'ai créé pour accueillir l'écriture de nouvelles, que ce soient les miennes ou les votres ...





Anise (Chapitre 4)

- An ... Ani ... Anise ?

Encore cette voix douce et lointaine qui venait percer sa nuit. Elle était calme, un peu traînante mais apaisante. Elle ne venait pas la tourmenter tout compte fait. Peut-être lui tenir compagnie dans la boîte noire où elle se trouvait enfermée à présent.

- Anise, tu entends le vent ?

Non elle n'entendait pas le vent mais elle aurait aimé plutôt que cette sensation d'être détâchée de tout sauf cette voix tantôt distincte, tantôt plus lointaine.

- Il gémit un peu et siffle autour de nous. Je crois qu'il essaye de rentrer mais que personne ne lui a laissé la porte ouverte. alors il supplie.

Elle voulait sortir elle, qu'une petite porte s'ouvre pour qu'elle sorte de ce noir mais elle restait enfermée avec une voix qui entend le vent. Dans sa chambre elle laissait parfois la fenêtre ouverte les jours d'orages, le vent sifflait et les touches du piano de sa mère dansaient avec lui des amours tragiques, des endiablées lancinantes, mariage terrifiant des contraires ... comme son père et sa mère en fait. Encore qu'ils n'étaient pas vraiment contraires, juste éteints, atténués jusqu'à l'asphyxie de la flamme.

- Tu crois qu'ils nous en voudraient si je le laissais entrer ?

Elle se demandait si on lui en voudrait de sortir à elle, si on ne l'avait pas mise dans le noir pour l'oublier définitivement. Pourtant il y avait toujours cette voix qui s'attachait à lui tenir compagnie. A moins qu'elle ne soit de celles qui parlent pour être écoutée, un peu comme sa mère qui parlait toute seule et se serait contentée de n'importe quelle autre coquille vide et muette pour lui rendre son écho. Finalement ce devait être ça : une voix off qui commente le néant.

- Je suis trop loin ...

Elle la trouvait un peu trop près cette voix finalement : elle avait supplié souvent l'oubli de la prendre sous son aile et finalement il lui avait enlevé tout le relief pour ne la laisser plus qu'avec le plus fade : sa conscience. Sa conscience et cette voix ...

- Tu connais l'Haboob ?

Drôle de nom, un peu bizarre mais intéressant.

- Là où j'habitais avant, un vieil:homme criait parfois Haboob et tout le monde fermait les fenêtres et on descendait dans les caves où les femmes chantaient et les hommes faisaient de la musique. Mais moi je sortais pour me mettre sur le toit avec une couverture et je regardais Haboob redessiner la terre. On voyait très peu mais il chantait bien Haboob ...

Elle essayait d'imaginer un géant qui tenait un pinceau et dessinait sur la terre en cachant l'horizon mais elle n'était pas très convaincue : la voix devait venir d'ailleurs parce que dans le monde de sa mère et de son père il n'y avait que des géants en pierre ennuyeux et immobiles.

- Ici Haboob ne vient jamais. Je ne connais pas le nom du vent d'ici, il chante souvent mais pas aussi fort qu'Haboob et pas aussi bien non plus. Toi tu dois le connaître Anise, ils ont écrit que tu étais née ici.

Elle était née dans cet endroit noir ? C'était donc de là qu'elle venait alors et là qu'elle avait fini par retourner : on s'était trompé, on l'avait retiré de la nuit pour la donner à des parents gris. Au fond elle savait que ce n'était pas ça mais elle avait toujours préféré voir les choses à sa manière plutôt que de chercher des raisons à toutes les raisons comme on le lui demandait à l'école. D'ailleurs elle ne trouvait jamais rien de ce qu'on attendait : elle préférait chercher des choses bien plus compliquées et insolubles que celles qui paraissaient évidentes au tableau. Et finalement elle se perdait dans ses dessins et sa tête devenait toute lourde et toute chaude tandis que ses yeux s'ouvraient sur son monde et se fermaient sur l'autre.

- Moi j'aimerais bien retourner là-bas, il y a plein de rires et de soleil, pas de maisons devant le ciel. Le vieil homme m'a dit que j'étais un enfant d'Haboob et qu'il y aurait toujours une oasis en moi. Et toi tu as quoi en toi ?

Un brindille dans un champs de ruines, c'était un peu ça : une petiteherbe folle qui dansait dans sa tête et y créait un monde où se perdre. Elle était la fille cachée de Rimbaud et elle était partie à sa recherche dans le monde des morts. A chaque fois qu'elle trouvait un indice, elle le mettait dans sa cachette et ça nourrissait le brindille. Avant elle comptait tout, les marches, les portes, les gens, les pierres, et puis elle avait découvert l'ivresse d'un voyage en bateau avec Rimbaud après que son image se soit échappée des flammes pour s'offrir à son regard intrigué. elle s'était alors perdue dans ses illuminations, sauvée de la dérive par des visions chimériques.

- J'entends quelqu'un venir ...


 
Ecrit par Songe, le Vendredi 9 Décembre 2005, 21:59 dans la rubrique "1-Anise".


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