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Anise (Chapitre 1)
Anise
Il y a des histoires qui commencent par des rires qui résonnent en écho, d'autres par des larmes qui laissent leurs sillons dans des coeurs solitaires, par des regards qui se croisent, par des sourires qui se répondent ou des mains qui s'effleurent timidement ... L'histoire d'Anise n'a jamais commencé, les rires elle les étouffe dans sa timidité, les pleurs elle les refoule dans sa pudeur, les sourires elle les aventure en coin, et les regards semblent glisser sur elle comme si ses grands yeux verts au regard profond invitaient à passer mais refusaient qu'on s'y arrête. Anise c'est la rêveuse, c'est la solitaire, celle qui se tient coîte et sage dans un coin où on l'oublie et où elle observe le monde, les gens qui tourbillonnent autour d'elle en un mystérieux ballet dont elle n'a jamais bien saisi le pas ... Anise c'est beaucoup de regards buissonniers par les grandes fenêtres d'école, c'est un cahier où elle dessinait des nuages et des fleurs petite et où elle écrit des poèmes aujourd'hui, c'est des chansons de voyage plein la tête et des romans d'aventure plein sa sacoche, c'est un esprit vagabond derrière des sens en alerte ... Certains naissent avec un milieu, une histoire déjà dans les gènes ou un avenir déjà tracé par les ambitions de ceux qui les enfantent; certains grandissent avec un environnement, qu'il soit de pleurs ou de sourires, de cris ou de rires, de coups ou de caresses. Anise, elle, est né ni d'haine ni d'amour, fruit d'indifférence, grandi dans le silence d'une maison vide. Sa mère voit des amis du grand monde, partage son service en porcelaine et ses biscuits raffinés dans des après-midi mondaines où on parle de tout sauf de ce que chacun à l'esprit. Le soir, quand elle range le dîner du traiteur, elle laisse un petit plat de côté sur la table de la cuisine puis va se noyer dans des gammes de piano qui lui font revivre son premier baiser vénitien, du temps où elle n'étouffait pas encore des larmes de solitude sur l'oreiller de son grand lit vide. Son père s'est expatrié dans un charter toujours suspendu en l'air entre deux horizons; il suit le cours des actions mais a depuis longtemps quitté le cours de ses sentiments. Il chiffre ses envies en dollars, compare ses plaisirs au Dow Jones quand il ne les trouve pas dans les bras occasionnels d'une maîtresse moins intéressée à son portefeuille que les autres. Anise, elle, c'est un accident, c'est une mauvaise surprise sur le tard qu'une écervelée a décidé de garder pour conserver auprès d'elle un homme qu'elle a trop aimé et qui l'a trop vite oublié. Anise c'est le souvenir douloureux de deux vies qui se sont croisées, mariées par la force des choses, unies ni pour le meilleur ni pour le pire juste pour la forme et l'apparence. Sa vie de famille se résume à des bises du bout des lèvres, des chèques postaux à son anniversaire et des soupirs depuis que les cris se sont érodés ... Les années de sa vie passée sont comme un bouquet dont l'effeuillement des pétales finirait fatalement par annoncer "pas du tout". Anise traverse les années mais ces dernières ne l'interpellent plus : il y a "le monde" et "le monde d'Anise". Seize années, d'écoles privées, de vacances occupées à vagabonder au gré des rues ou au hasard des allées d'une bibliothèque, d'une librairie; seize années dans des petits chemisiers, le nez chaussé de sévères lunettes cerclées, les cheveux sagement peignés et ramenés en tresse. Elle a grandi dans un univers où le chéquier et la Mastercard sont un passe-droit, le signe de reconnaissance d'un individu à l'autre. Alors qu'à son âge ses camarades se fabriquent des souvenirs sur les banquettes arrière de leurs Porsches ou au rythme des pulsations électroniques, elle en est restée à l'immaculée conception parentale et aux harmonies classiques maternelles. Sa vie est enfermée dans quelques mètres carrés clos d'une chambre où elle dessine sur les murs, grave les meubles, le plancher et le plafond, coud, transforme, déforme chaque petit espace de son jardin secret; un univers qu'elle ferme à clé quand elle rejoint d'un pas feutré l'univers des fauteuils de cuir tendu qui se lissent et effacent les traces dès qu'on les abandonne, les plateaux de verre aussi froids et sibyllins que des plaques de glace posées sur des tiges de fer nu, les grandes armoires zen dont le contenu est aussi épuré que l'apparence, les grandes dalles brillantes où la vie n'attarde jamais une tâche, le silence épais vibrant de quelques nocturnes mélancoliques de Chopin ... Dans son jardin secret elle a fait de l'aération une alcôve pour ses trésors (le canard en plastique qu'un enfant lui a offert dans un bac à sable, un trèfle dont elle fendu une feuille en deux, un portrait de Rimbaud froissé qui s'est enfui par la fenêtre d'un incendie ...), elle dort sur un tas d'oreiller et cultive des fleurs sur le sommier de son ancien lit, elle a tendu des draps peints sous le plafond et entrepose ses livres en piles dans chaque espace de libre. Ses murs sont couverts de dessins et de poèmes venus d'univers étranges qu'elle invente pour combler les vides du sens qui cimentent les journées de sa vie les unes aux autres. C'est là qu'elle a toute son existence, entre quatre murs clos baignés par la faible lueur qu'elle laisse passer par les stores ... Anise c'est un îlot d'évasion perdu dans un océan de vide ...
Ecrit par Songe, le Mercredi 1 Décembre 2004, 19:02 dans la rubrique "1-Anise".
Commentaires :
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Remarques
myel : J'aime bien cet endroit un peu froid et tout calme... Songe : J'aime bien savoir que tu t'y attarde :)
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